Cohorte de la Légion d'honneur

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Article principal : Légion d'honneur.

La cohorte de la Légion d'honneur était une division administrative et territoriale de la France, visant à organiser l'ordre de la Légion d'honneur, lors de sa création, sur l'ensemble du territoire de la première République française puis du Premier Empire.

Historique

Décret du 29 floréal an X () portant création de la Légion d'honneur.

Devenu Premier Consul, Napoléon Bonaparte entreprend de réorganiser le pays sur des bases nouvelles nées de la Révolution tout en conservant certains fondements de l'Ancien Régime. C'est dans ce contexte que s'inscrit la création d'une récompense, la Légion d'honneur destinée à regrouper l'élite de la Nation : « Il faut créer un ordre qui soit le signe de la vertu, de l'honneur, de l'héroïsme, une distinction qui serve à la fois à la bravoure militaire et au mérite civil »[1].

La Légion d'honneur créée, il fallut ensuite l'organiser. Le décret du 29 floréal an X régla l'organisation primitive de la Légion d'honneur : elle fut composée d’un grand conseil d’administration composée de 7 membres[2] et divisée, territorialement en quinze (puis seize) cohortes auxquelles étaient affectés des biens nationaux portant 200 000 francs de rentes. L'arrêté du 13 messidor an X () compléta l'organisation et l'administration de la Légion d'honneur en découpant le territoire de la France en seize cohortes.

Décret du 29 floréal an X () portant création de la Légion d'honneur

(N.° 1604.) Loi portant création d'une Légion d'honneur.

Du 29 floréal.

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS, BONAPARTE, Premier Consul, PROCLAME loi de la République le décret suivant, rendu par le Corps législatif le 29 floréal an X, conformément à la proposition faite par le Gouvernement le 25 dudit mois, communiquée au Tribunat le 27 suivant.
D E C R E T.
T I T R E P R E M I E R.
Création et organisation de la légion d'honneur.
  • ART. Ier En exécution de l'article 87 de la Constitution, concernant les récompenses militaires, et pour récompenser aussi les services et les vertus civils, il sera formé une légion d'honneur.
  • II. Cette légion sera composée d'un grand conseil d'administration, et de quinze cohortes, dont chacune aura son chef-lieu particulier.
  • III. Il sera affecté à chaque cohorte, des biens nationaux portant deux cent mille francs de rente.
  • IV. Le grand conseil d'administration sera composé de sept grands officiers ; savoir ; des trois Consuls, et de quatre autres membres, dont un sera nommé entre les sénateurs, par le Sénat ; un autre, entre les membres du Corps législatif, par le Corps législatif ; un autre, entre les membres du Tribunat, par le Tribunat ; et un enfin, entre les conseillers d'état, par le conseil d'état. Les membres du grand conseil d'administration conserveront, pendant leur vie, le titre de grand officier, lors même qu'ils seraient remplacés par l'effet de nouvelles élections.
  • V. Le Premier Consul est, de droit, chef de la légion, et président du grand conseil d'administration.
  • VI. Chaque cohorte sera composée
de sept grands officiers,
de vingt commandans,
de trente officiers,
et de trois cent cinquante légionnaires.

Les membres de la légion sont à vie.

  • VII. Il sera affecté à chaque grand officier cinq mille fr.
À chaque commandant, deux mille francs ;
À chaque officier, mille francs ;
Et à chaque légionnaire, deux cent cinquante francs.
Ces traitements sont pris sur les biens affectés à chaque cohorte.
  • VIII. Chaque individu admis dans la légion, jurera, sur son honneur, de se dévouer au service de la République, à la conservation de son territoire dans son intégrité, à la défense de son gouvernement, de ses lois, et des propriétés qu'elles ont consacrées ; de combattre par tous les moyens que la justice, la raison et les lois autorisent, toute entreprise tendant à rétablir le régime féodal, à reproduire les titres et qualités qui en étaient l'attribut ; enfin, de concourir de tout son pouvoir au maintien de la liberté et de l'égalité.
  • IX. Il sera établi dans chaque chef-lieu de cohorte, un hospice et des logemens, pour recueillir soit les membres de la légion que leur vieillesse, leurs infirmités ou leurs blessures auraient mis dans l'impossibilité de servir l'État, soit les militaires qui, après avoir été blessés dans la guerre de la liberté, se trouveraient dans le besoin.
T I T R E II.
Composition.
  • ART. Ier Sont membres de la légion tous les militaires qui ont reçu des armes d'honneur.
Pourront y être nommés les militaires qui ont rendu des services majeurs à l'État dans la guerre de la liberté ;
Les citoyens qui, par leur savoir, leurs talens, leurs vertus, ont contribué à établir ou à défendre les principes de la République, ou fait aimer et respecter la justice ou l'administration publique.
  • II. Le grand conseil d'administration nommera les membres de la légion.
  • III. Durant les dix années de paix qui pourront suivre la première formation, les places qui viendront à vaquer demeureront vacantes jusqu'à concurrence du dixième de la légion, et, par la suite, jusqu'à concurrence du cinquième. Ces places ne seront remplies qu'à la fin de la première campagne.
  • IV. En temps de guerre, il ne sera nommé aux places vacantes qu'à la fin de chaque campagne.
  • V. En temps de guerre, les actions d'éclat feront titre pour tous les grades.
  • VI. En temps de paix, il faudra avoir vingt-cinq années de service militaire, pour pouvoir être nommé membre de la légion ; les années de service, en temps de guerre, compteront double, et chaque campagne de la guerre dernière comptera pour quatre années.
  • VII. Les grands services rendus à l'État dans les fonctions législatives, la diplomatie, l'administration, la justice, ou les sciences, seront aussi des titres d'admission, pourvu que la personne qui les aura rendus ait fait partie de la garde nationale du lieu de son domicile.
  • VIII. La première organisation faite, nul ne sera admis dans la légion qu'il n'ait exercé pendant vingt-cinq ans ses fonctions avec la distinction requise.
  • IX. La première organisation faite, nul ne pourra parvenir à un grade supérieur qu'après avoir passé par le plus simple grade.
  • X. Les détails de l'organisation seront déterminés par des réglemens d'administration publique : elle devra être faite au 1er vendémiaire an XII ; et, passé ce temps, il ne pourra y être rien changé que par des lois.

Collationné à l'original, par nous président et secrétaires du Corps législatif. A Paris, le 29 Floréal, an X de la République française. Signé RABAUT le jeune, président ; Thiry, Tupinier, Bergier, Rigal, secrétaires.

Soit la présente loi revêtue du sceau de l'État, insérée au Bulletin des lois, inscrite dans les registres des autorités judiciaires et administratives, et le ministre de la justice chargé d'en surveiller la publication. A Paris, le 9 prairial an X de la République.
Signé BONAPARTE, Premier Consul. Contre-signé, le secrétaire d'État, HUGUES B. MARET. Et scellé du sceau de l'État.
Vu, le ministre de la justice, signé ABRIAL.
Source
www.crdp-reims.fr
 
Arrêté relatif à l'organisation d'une Légion d'honneur du 13 messidor an X

B. 201, n°. 1808.

Les Consuls de la République, le Conseil d'État entendu, arrêtent :


T I T R E P R E M I E R.
De la division du territoire de la République relativement à l'établissement des cohortes de la Légion d'honneur.
  • ART. Ier La division du territoire de la République pour la circonscription des seize cohortes, en y comprenant la 27e division militaire, qui formera la 16e cohorte, est fixé conformément au tableau annexé au présent arrêté.
  • II. Les chefs-lieux des seize cohortes seront établis dans des palais et autres édifices nationaux.
  • III. La résidence du Grand officier chef de la cohorte, le lieu des séances du conseil d'administration et l'hospice, seront dans le même établissement, dans le même édifice ou la même enceinte.
T I T R E II.
Du grand Conseil d'administration.
  • IV. Le grand Conseil s'assemblera une fois par mois.
  • V. Une séance extraordinaire, dans le semestre d'été, sera destinée à proclamer les nouvelles promotions, et recevoir solennellement le serment des nouveaux légionnaires : cette séance se tiendra au chef-lieu de la première cohorte, et, autant qu'il sera possible, alternativement dans chaque chef-lieu.
  • VI. Dans cette séance extraordinaire, l'un des membres du conseil prononcera l'éloge, en forme de notice historique, des membres de la Légion qui seront morts dans le courant de l'année.
  • VII. Le grand Conseil nommera un grand chancelier de la Légion d'honneur et un Trésorier général, qui seront Grands officiers.
  • VIII. Le grand Chancelier aura séance au grand Conseil. Il sera dépositaire du sceau.
  • IX. Le grand Chancelier veillera à ce que les noms des individus formant la cohorte soient inscrits sur des tables de marbre placées dans le chef-lieu de chaque cohorte, et que les noms de tous les individus composant la Légion soient inscrits sur des tables de marbre placées dans le dôme des Invalides.
  • X. Le grand Chancelier sera chargé de la tenue du registre de délibérations du grand Conseil, de la rédaction des procès-verbaux, et de l'expédition de la correspondance.
  • XI. Le grand Conseil dirige et surveille l'administration des biens nationaux affectés à la Légion.
Il en réglera et proportionnera la répartition d'après celle du territoire, et d'après la nature et la valeur des biens qui se trouveront dans l'arrondissement de la cohorte ; il confiera aux conseils d'administration telle ou telle portion de revenu à percevoir, ordonnera les versemens d'un arrondissement de cohorte sur un autre, approuvera les divers modes de gestion qui lui seront proposés, recevra, vérifiera et arrêtera la comptabilité des cohortes.
  • XII. À chaque séance de trimestre, le grand Chancelier remettra au grand Conseil un état de situation des seize cohortes au Ier du mois commençant ledit trimestre, et un résumé des comptes rendus et arrêtés par les conseils d'administration des cohortes, dont il sera parlé ci-après, pour le trimestre précédent ; de manière qu'à la séance de nivôse, toute la comptabilité de l'année précédente puisse être apurée.
  • XIII. Les quatre Grands officiers, membres du grand Conseil d'administration, nommés par les grandes autorités, n'auront d'autre rang que celui que leur donnera, parmi les Grands officiers autres que les chefs de cohorte, la date de leur promotion.
T I T R E III.
Des Conseils d'administration des cohortes.
  • XIV. Il sera établi dans chacun des chefs-lieux de cohorte désignée dans le titre Ier, un conseil particulier d'administration, qui sera chargé de la gestion des biens affectés à la cohorte, ainsi que de la direction de l'hospice qui y sera établi, conformément à l'article IX du titre Ier de la loi du 29 floréal.
  • XV. Ce conseil sera composé de neuf membres, désignés par le chef de légion, parmi les membres de la Légion ; savoir :
Un Grand-Officier, chef de la cohorte, président ;
Deux Commandans ;
Trois Officiers, y compris un Chancelier de la cohorte et un Trésorier : ces deux derniers n'auront point voix délibérative ;
Trois Légionnaires.
  • XVI. Les Conseils d'administration de cohorte s'assembleront deux fois par mois, le Ier et le 15, au chef-lieu de la cohorte.
Le procès-verbal de chaque séance sera immédiatement adressé au Conseil général de la Légion.
  • XVII. Outre ces séances, il en sera tenu, chaque année, une extraordinaire, au jour indiqué par le chef de la Légion, pour distribuer les diplômes envoyés par le grand Conseil, et recevoir le serment des nouveaux légionnaires : cette séance se tiendra au chef-lieu de la cohorte.
  • XVIII. Dans cette séance extraordinaire, on prononcera l'éloge, en en forme de notice historique, des membres de la cohorte décédés pendant le courant de l'année.
  • XIX. Le chancelier de la cohorte veillera à ce que les noms des individus formant la cohorte soient inscrits sur des tables de marbre placées dans le chef-lieu de chaque cohorte.
  • XX. Les chanceliers des cohortes rempliront les fonctions de secrétaires des conseils d'administration. Ils seront chargés de la tenue du registre des délibérations, de la rédaction des procès-verbaux, et de l'expédition de la correspondance avec le grand conseil.
  • XXI. Le trésorier de la cohorte est chargé de recevoir les revenus et de payer les traitements des officiers de tout rang et des légionnaires, conformément aux états qui en auront été arrêtés par le grand-conseil de la Légion. Il établira, d'après les dispositions ci-après, la comptabilité de l'hospice.
  • XXII. Les trésoriers remettront, le premier de chaque mois, aux conseils d'administration des cohortes, un état de situation de la cohorte et un état des recettes et dépenses faites pendant le mois précédent.
  • XXIII. À chaque première séance de trimestre, le trésorier soumettra au conseil de la cohorte tout ce qui aura rapport à la comptabilité du trimestre précédent : chaque partie de cette comptabilité ayant été successivement examinée et arrêtée par le conseil dans les séances précédentes, elle sera entièrement consommée et close dans celle-ci, et le résultat devra être immédiatement transmis au grand-conseil dans les trois premiers jours du mois. Enfin, les comptes du trésorier seront vérifiés et arrêtés tous les ans par le conseil de la cohorte, et présentés au grand-conseil.
T I T R E VI.
De l'établissement et de l'administration des Hospices.
  • XXIV. La destination des édifices et propriétés nationales qui seront jugés convenables pour l'établissement des hospices et de la résidence des chefs-lieux des cohortes, sera déterminée par des arrêtés particuliers.
  • XXV. Ces hospices seront formés à l'instar des succursales de l'Hôtel national des Invalides : leur organisation sera la même, avec cette seule différence, que les hospices de la Légion d'honneur seront régis et administrés par les conseils d'administration des cohortes.
  • XXVI. Aucun militaire autre que les légionnaires ne sera admis dans les hospices des Légions que sur l'autorisation du grand conseil.
  • XXVII. Les militaires reçus à l'hospice de la cohorte en vertu de l'autorisation du grand-conseil, y seront logés, nourris et habillés aux frais de l'hospice, au moyen du payement qui sera fait à la caisse de la cohorte, du montant des pensions auxquelles ces militaires qui y seront reçus, auraient eu droit, s'ils n'avaient pas préféré l'Hôtel des Invalides,
  • XXVIII. Les légionnaires et les autres militaires admis dans les hospices des cohortes auront la liberté d'en sortir quand ils le jugeront convenable : ils jouiront alors des pensions qui leur auront été précédemment accordées; mais, pendant leur séjour à l'hospice, ils ne toucheront que le traitement qui a été affecté à chaque grade par le règlement concernant l'Hôtel national des Invalides,
  • XXIX. Les détails de l'administration de chaque hospice seront confiés à un économe, qui sera nommé par le grand-conseil de la Légion, sur la présentation du conseil d'administration de la cohorte.
  • XXX. L'économe rendra compte de sa gestion, tous les mois, au conseil d'administration de la cohorte, qui fera surveiller le service par un de ses membres.
  • XXXI. La fourniture des lits, ustensiles, linge et effets, aliments, boissons, bois et lumière, pourra être donnée au rabais par le conseil d'administration, à la charge de l'approbation du grand conseil de la Légion.
  • XXXII. Les conseils d'administration des cohortes ne pourront faire aucun marché, ni approuver aucune espèce de dépense sans l'autorisation spéciale du grand conseil de la Légion.
  • XXXIII. Le trésorier arrêtera tous les mois, en présence de l'officier chargé de la surveillance de l'hospice, le compte de l'économe.
À la fin de chaque trimestre, la comptabilité du trimestre sera arrêtée par le conseil d'administration, conformément à ce qui a été prescrit ci-dessus à l'article XXII, titre III.
  • XXXIV. Le compte général de la dépense de l'hospice sera arrêté tous les ans par le conseil d'administration de la cohorte. Ce compte, expédié en double, servira de pièce justificative à celui des recettes et dépenses du trésorier, et entrera dans le résultat de la comptabilité de chaque cohorte, qui, aux termes de l'article XII, titre II ci-dessus, doit être présenté au grand-conseil.


DIVISION des arrondissemens des seize cohortes de la légion d'honneur.

(tableau)

Le Premier Consul, signé Bonaparte. Par le Premier Consul, le secrétaire d'État, signé H.-B. Maret. Le Ministre de la justice, signé Abrial.

Source
C. L. Gillot, Dictionnaire des constitutions de l'Empire français et du royaume d'Italie : formant un recueil complet de tout ce qui y a trait et rapport, et contenant le texte, 1°, de toutes les lois y relatives; 2°, du décret de réunion de l'État de Gênes à l'Empire français,, vol. 2, L'Impr. de J. Gratiot, (lire en ligne)
 

L'Empereur supprima cette expérience dès qu'elle se l'estima inefficace et ruineuse. Il renonça à une idée qui lui était chère au profit d'une utilisation plus pratique des terres domaniales. Cette réforme se fit en trois étapes : le décret du 11 pluviôse an XIII tout d'abord qui ordonna la vente de tous les biens non nécessaires pour constituer un revenu de 100 000 francs à la cohorte (on se souvient que le revenu primitif était de 200 000 francs), puis le décret du 15 ventôse an XIII autorisa l'aliénation libre des biens des cohortes, enfin le décret du qui supprima l'administration des cohortes et en transféra les biens à la caisse d'amortissement qui les transforma en rentes.

Rôle

Le projet reprenait l'optique des anciens ordres hospitaliers, car sur le territoire de chaque cohorte devaient se trouver « un hospice et des logements pour recueillir, soit les membres de la Légion que leur vieillesse, leurs infirmités ou leurs blessures auraient mis dans l’impossibilité de servir l’État, soit les militaires qui, après avoir été blessés dans la guerre de la liberté, se trouveraient dans le besoin (Titre I - Article 9) ». L'article 2 de la loi du 29 floréal avait fixé à quinze le nombre des cohortes, mais, la 27e division militaire ayant été immédiatement composée et la réunion des départements du Piémont étant décidée, on dut en former une seizième cohorte, quoique la réunion ne fut légalement prononcée que le 11 septembre (24 fructidor).

Chaque cohorte avait une vie communautaire puisque tous les légionnaires faisant partie des conseils de l'ordre de chacune des quinze cohortes, devaient se réunir deux fois par mois au moins au siège de la cohorte, et tous les légionnaires gradés ou non devaient au moins une fois par an se réunir au siège de la cohorte sous la présidence du chef de cohorte, dans une assemblée où l'on recevait le serment des nouveaux légionnaires et où on entendait l'éloge de ceux qui avait disparu.

La cohorte jouait également un rôle de médiateur entre l'usager et l'administration tout puissante : ainsi, les vieux soldats paysans mais légionnaires, qui subissaient les tracasseries de fonctionnaires médiocres, pouvaient rencontrer en petit comité un prestigieux maréchal d'Empire ou un amiral ayant accès direct auprès du Premier Consul, puis de l'Empereur lui-même. Pierre-Louis Roederer disait d'ailleurs au Corps Législatif dans la discussion sur la Légion d'Honneur le 15 floréal an X : « C'est une institution politique qui place dans la société des intermédiaires par lesquels les actes du pouvoir sont traduits à l'opinion avec fidélité et bienveillance et par lesquels l'opinion peut remonter jusqu'au pouvoir ».

La Légion d'honneur possédait 10 millions de bien-fonds et pouvait donc régir ses vastes domaines selon un mode expérimental[3]. Les cohortes se devaient de favoriser l'acclimatation des arbres utiles ou de plantes potagères ou médicinales ; elles devraient également provoquer le dessèchement des marais, boiser les landes, fertiliser les dunes, importer des races étrangères d'animaux de labour ou de bêtes de somme, créer des haras particuliers nécessaires à la remonte de la cavalerie et de l'artillerie.

Le résultat de cette politique agricole fut d'augmenter les revenus des cohortes grâce auxquels on pouvait entretenir les hôpitaux et les fondations destinés aux légionnaires âgés ou malades, tout en créant également une école d'agriculture.

Composition

La première République française et son territoire en 1800.

L'organisation au début, est de type militaire : chaque cohorte est dirigée par un général et composée de 7 Grands officiers, 20 commandants, 30 officiers et 350 légionnaires. Chacun porte serment et reçoit un traitement prélevé sur les biens de la cohorte :

La cohorte regroupait tous les légionnaires d'une région française composée de 6 à 9 départements, sous la direction d'un conseil de 9 membres comprenant :

Les chefs des cohortes étaient tous maréchaux de l'Empire sauf ceux des 10e et 13e cohortes qui sont respectivement l'amiral Decrès et l'amiral Bruix.

Les 16 cohortes

Cohorte Chef-lieu Chef de la cohorte Chancelier Trésorier Revenus bruts[4] de la cohorte
(en francs)
Départements
composant la cohorte
Population de la cohorte
(en nb d'habitants)
1re cohorte Fontainebleau, puis Crosne Louis-Alexandre Berthier Claude François Lefeuvre, commissaire ordonnateur des guerres Martin-Roch-Xavier Estève, trésorier de l'Empereur 300 000 Aube, Marne, Oise, Seine, Seine-et-Oise, Seine-et-Marne 2 241 240
2e cohorte Abbaye Saint-Vaast, à Arras Adolphe Édouard Casimir Joseph Mortier François-Joseph Lefebvre-Cayet, député au Corps législatif Jacques Louis Nicolas Vaillant, ex-constituant, maire d'Arras 300 000 Aisne, Ardennes, Jemmapes, Nord, Pas-de-Calais, Somme 2 677 104
3e cohorte Abbaye Saint-Pierre de Gand Jean-Baptiste Bessières François Joseph Beyts, procureur général impérial près la cour d'appel de Bruxelles Joseph Sébastien Dellafaille, député au Corps législatif 300 000 Lys, Escaut, Dyle, Deux-Nèthes, Ourthe, Sambre-et-Meuse 2 142 325
4e cohorte château de Brühl Nicolas Jean-de-Dieu Soult Joseph de Salm-Reifferscheidt-Dyck, député au Corps législatif Louis Maximilien Rigal, député au Corps législatif 529 851 Meuse-Inférieure, Forêts, Roer, Sarre, Rhin-et-Moselle, Mont-Tonnerre 2 035 093
5e cohorte Château de Saverne François Joseph Lefebvre Antoine Augustin Engelmann, conseiller de préfecture du Bas-Rhin Jean François Philibert Rossée, député au Corps législatif 263 093 Bas-Rhin, Haut-Rhin, Meurthe, Vosges, Moselle, Meuse, Haute-Marne 2 248 776
6e cohorte Ancien Palais des États de Bourgogne, à Dijon Louis Nicolas Davout Martin Lejéas-Carpentier, député au Corps législatif Nicolas Edme Viesse de Marmont, père du duc de Raguse 268 322 Doubs, Jura, Haute-Saône, Nièvre, Côte-d'Or, Saône-et-Loire, Léman, Yonne 2 306 809
7e cohorte Archevêché de Vienne (Isère) Michel Ney André Horace François de Barral de Rochechinard, général de brigade N. Plantain maire de Valence 462 146 Rhône, Loire, Haute-Loire, Isère, Mont-Blanc, Ain, Puy-de-Dôme, Allier 2 582 754
8e cohorte Ancien archevêché d'Aix Jean-Baptiste Bernadotte Joseph Gaspard Emmanuel Mathieu Pézenas, militaire Antoine-Ignace Anthoine négociant, maire de Marseille 632 500 Basses-Alpes, Hautes-Alpes, Bouches-du-Rhône, Var, Drôme, Vaucluse, Alpes-Maritimes, Golo, Liamone 1 493 063
9e cohorte Ancien évêché de Béziers Jean Lannes Marie Henri François Élisabeth de Carrion de Nisas, tribun Jean-Pascal Rouyer, général de brigade 177 837 Ardèche, Cantal, Gard, Lozère, Hérault, Tarn, Aveyron 1 785 767
10e cohorte Hôtel Saint-Jean puis ancien collège de l'Esquile de Toulouse Denis Decrès François Lagrange, ancien président du Corps législatif Guillaume Desazars, premier président de la Cour d'appel de Toulouse 111 133 Aude, Haute-Garonne, Hautes-Pyrénées, Basses-Pyrénées, Pyrénées-Orientales, Ariège, Gers 1 738 092
11e cohorte Ancien évêché et séminaire d'Agen Bon Adrien Jeannot de Moncey Jean Chrysostome Lacuée, premier président de la cour d'appel d'Agen Xavier de Sevin, chevalier de Malte 174 049 Landes, Gironde, Lot-et-Garonne, Lot, Dordogne, Corrèze 2 062 960
12e cohorte Abbaye de Saint-Maixent Joachim Murat Piter Deurbroucq[5], négociant, député Charles Jean Louis Aymé, officier du génie 414 049 Deux-Sèvres, Vendée, Vienne, Charente, Charente-Inférieure, Loire-Inférieure 1 806 802
13e cohorte Château de Craon et le Couvent des dominicains[Où ?] Étienne Eustache Bruix Joseph Anne Robert Malherbe, ex-tribun Guy Lorin maire de Rennes 250 000 Morbihan, Finistère, Côtes-du-Nord, Ille-et-Vilaine, Mayenne, Maine-et-Loire 2 513 032
14e cohorte Abbaye du Bec, près de Bernay André Masséna Louis-Jacques Savary, député au Corps législatif Lézurier (l'aîné), président du tribunal de commerce de Rouen 251 677 Manche, Calvados, Orne, Eure, Seine-Inférieure, Eure-et-Loir 2 649 458
15e cohorte Château de Chambord Charles Pierre François Augereau Pierre Jean Alexandre de Tascher de La Pagerie, chevalier de Saint-Louis Henri de Fontenay, député au Corps législatif 329 900 Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Cher, Indre, Loiret, Sarthe, Creuse, Haute-Vienne 2 039 699
16e cohorte Pavillon de chasse de Stupinigi Jean-Baptiste Jourdan Giuseppe Angelo Saluzzo di Menusiglio[6], officier général, de l'Académie de Turin Ignace Laugier, maire de Turin 500 000 Doire, Éridan, Marengo, Sésia, Stura, Tanaro non communiqué
Chefs-lieux des cohortes de la Légion d'Honneur
Chefs-lieux des cohortes de la Légion d'Honneur.

Annexes

Bibliographie

  • C. L. Gillot, Dictionnaire des constitutions de l'Empire français et du royaume d'Italie : formant un recueil complet de tout ce qui y a trait et rapport, et contenant le texte, 1°, de toutes les lois y relatives; 2°, du décret de réunion de l'État de Gênes à l'Empire français,, vol. 2, L'Impr. de J. Gratiot, (lire en ligne) ;
  • Testu, Almanach impérial pour l'année 1810 : présenté à S.M. l'Empereur et Roi par Testu, Paris, Testu, (lire en ligne) ;
  • A. Lievyns, Jean Maurice Verdot, Pierre Bégat, Fastes de la Légion d'honneur, biographie de tous les décorés accompagnée de l'histoire législative et réglementaire de l'ordre, vol. 1, [détail de l’édition] (BNF 37273876)  ;
  • Gabriel de Chamberet, Manuel du légionnaire : ou, Recueil des principaux décrets, lois, ordonnances, etc. relatifs à l'ordre de la Légion d'honneur depuis l'époque de sa création jusqu'à nos jours; précédé d'un précis historique sur la légion d'honneur, et suivi des décrets sur les maisons d'éducation de l'Ordre, sur ..., Corréard, , 2e éd., 347 p. (lire en ligne) ;

Notes et références

  1. CRDP de Champagne-Ardenne, « La légion d'honneur », sur crdp-reims.fr, (consulté le )
  2. Bonaparte organisa aussitôt le grand conseil d'administration. Le 16 thermidor an X (), furent nommés membre du grand conseil de la Légion d'honneur, de droit, les trois Consuls : Napoléon Bonaparte, Cambacérès et Lebrun, le Sénat conservateur désigna le général Kellermann, le Tribunat Lucien Bonaparte, le Conseil d'État Joseph Bonaparte. Le Corps législatif n’étant plus en session, Bernard Germain de Lacépède fut désigné comme septième membre. L’une des premières tâches du grand conseil d’administration fut de nommer, le 3 fructidor an XI (), un Grand chancelier (ce fut Lacépède qui resta Grand Chancelier jusqu’à la fin de l’Empire et fut confirmé pendant les Cent-Jours) et un grand-trésorier (Jean François Aimé Dejean, ministre de l'Administration de la Guerre).
  3. Un exemple pris dans la 4e cohorte (La 4e cohorte comprenait la région rhénane, son chef-lieu est au château de Bruhl, elle comprend les départements de la Meuse inférieure, des forêts, du Roer, de la Sarre, du Rhin et Moselle et du Mont-Tonnerre) suffira à en comprendre le fonctionnement. L'agent de la cohorte M. Lamotte-Paisant dresse un rapport au chef de la cohorte, le maréchal Soult, et au chancelier, le prince de Salm-Dyck, dans lequel il expose les orientations nécessaires dans l'exploitation des domaines. « Il faut en diviser l'exploitation, dit-il, en sept branches principales :
    1. Acquisition de bêtes à laine, race d'Espagne,
    2. Acquisition de bêtes à cornes, établissement d'un troupeau de souche,
    3. Défrichements, formation de prairies artificielles,
    4. Plantation d'arbres fruitiers tel que poiriers, pommiers à cidre, pruniers à eau-de-vie, noyers, etc.,
    5. Établissement dans les chefs-lieux de distilleries pour les eaux-de-vie de grains, de pommes de terre et de prunes,
    6. Ensemencement de colza et de navette, établissement de moulins pour la fabrication des huiles,
    7. Ensemencement de lin, chanvre et établissements pour leur préparation, filatures et emplois. »
  4. Quotité du revenu brut des biens affectés à la dotation de chaque cohorte
  5. « Piter Deurbroucq », sur roglo.eu, Base de données généalogique (consulté le )
  6. « Biographie de Giuseppe Angelo Saluzzo di Saluzzo Monesiglio 1734 - Torino 1810, sur www.imss.fi.it »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur imss.fi.it (consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

  • CRDP de Champagne-Ardenne, « LA LÉGION D'HONNEUR », sur crdp-reims.fr, (consulté le ) ;
  • Jean-Claude Guegand, « La Légion d'honneur, histoire de l'Ordre », sur pagesperso-orange.fr (consulté le ) ;
  • « Ordre de la Légion d'honneur sur medaille.decoration.free.fr », sur medaille.decoration.free.fr (consulté le ) ;
  • Thierry Pouliquen, « Les cohortes de la Légion d'honneur », sur Les hommes de Napoléon Ier, (consulté le ) ;
  • André DAMIEN, « Origines de la Légion d'honneur », sur napoleon.org, (consulté le ), Évolution de la conception première ;
  • La Légion d'honneur sur www.farac.org ;
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