Théorème de Cauchy-Peano-Arzelà

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Le théorème de Cauchy-Peano-Arzelà est un théorème d'analyse qui garantit qu'un problème de Cauchy possède toujours au moins une solution locale, sous réserve que la fonction définissant l'équation différentielle soit continue.

Énoncé

Soient

  • f : K R n {\displaystyle f:K\rightarrow \mathbb {R} ^{n}} une fonction continue à valeurs dans R n {\displaystyle \mathbb {R} ^{n}} , définie sur un cylindre compact K := [ t 0 a , t 0 + a ] × B ( x 0 , r ) ¯ R × R n {\displaystyle K:=[t_{0}-a,t_{0}+a]\times {\overline {B(x_{0},r)}}\subset \mathbb {R} \times \mathbb {R} ^{n}} ,
  • M {\displaystyle M} un majorant de la norme de f {\displaystyle f} sur K {\displaystyle K} ,
  • c = min ( a , r / M ) {\displaystyle c={\text{min}}(a,r/M)} .

Alors[1], il existe une solution

x : [ t 0 c , t 0 + c ] B ( x 0 , r ) ¯ {\displaystyle x:[t_{0}-c,t_{0}+c]\to {\overline {B(x_{0},r)}}}

au problème de Cauchy

x ( t 0 ) = x 0  et  x = f ( t , x ) . {\displaystyle x(t_{0})=x_{0}{\text{ et }}x'=f(t,x).}

On peut même, dans cet énoncé, remplacer simultanément les deux intervalles centrés en t 0 {\displaystyle t_{0}} par des demi-intervalles d'extrémité t 0 {\displaystyle t_{0}} [2].

N. B. Contrairement à ce que permet de conclure le théorème de Cauchy-Lipschitz sous des hypothèses plus restrictives, il n'y a pas unicité ici[3].

Exemples

Les exemples suivants sont donnés par Peano[4].

L'équation d x d t = 3 x 2 / 3 {\displaystyle {\frac {\mathrm {d} x}{\mathrm {d} t}}=3x^{2/3}} où le second membre est continu en x = 0 {\displaystyle x=0} sans être lipschitzien, admet les solutions x = t 3 {\displaystyle x=t^{3}} et x = 0 {\displaystyle x=0} qui s'annulent toutes les deux en t = 0 {\displaystyle t=0} ainsi que les fonctions qui sont nulles dans l'intervalle [ 0 , a ] {\displaystyle [0,a]} et qui prennent la valeur ( t a ) 3 {\displaystyle (t-a)^{3}} pour t > a {\displaystyle t>a} .

L'équation d x d t = 4 x t 3 x 2 + t 4 {\displaystyle {\frac {\mathrm {d} x}{\mathrm {d} t}}={\frac {4xt^{3}}{x^{2}+t^{4}}}} , toujours avec la condition x ( 0 ) = 0 {\displaystyle x(0)=0} , admet les cinq solutions ( C {\displaystyle C} étant une constante arbitraire positive) :

x ( t ) = t 2   {\displaystyle x(t)=t^{2}~}
x ( t ) = t 2   {\displaystyle x(t)=-t^{2}~}
x ( t ) = 0   {\displaystyle x(t)=0~}
x ( t ) = C C 2 + t 4 {\displaystyle x(t)=C-{\sqrt {C^{2}+t^{4}}}}
x ( t ) = C 2 + t 4 C {\displaystyle x(t)={\sqrt {C^{2}+t^{4}}}-C}

Esquisse de démonstration

On construit par la méthode d'Euler une suite de fonctions M-lipschitziennes affines par morceaux

x n : [ t 0 c , t 0 + c ] B ( x 0 , r ) ¯ {\displaystyle x_{n}:[t_{0}-c,t_{0}+c]\to {\overline {B(x_{0},r)}}}

qui sont des « solutions approchées » de ce problème de Cauchy au sens où pour tout entier n > 0,

x n ( t 0 ) = x 0 et x n ( t ) f ( t , x n ( t ) ) 1 / n {\displaystyle x_{n}(t_{0})=x_{0}\quad {\text{et}}\quad \|x'_{n}(t)-f(t,x_{n}(t))\|\leq 1/n}

(pour tout point t en lequel xn est dérivable).

Le théorème d'Ascoli permet d'en extraire une sous-suite uniformément convergente. On montre alors (en utilisant la continuité uniforme de f) que la limite x vérifie

t [ t 0 c , t 0 + c ] , x ( t ) = x 0 + t 0 t f ( τ , x ( τ ) )   d τ . {\displaystyle \forall t\in [t_{0}-c,t_{0}+c],x(t)=x_{0}+\int _{t_{0}}^{t}f(\tau ,x(\tau ))~\mathrm {d} \tau .}

D'après le premier théorème fondamental de l'analyse, x est donc une « solution exacte » du problème de Cauchy.

Cas des espaces de Banach

La généralisation « naïve » de l'énoncé aux espaces de dimension infinie est drastiquement fausse :

  • pour tout[5] espace de Banach E {\displaystyle E} de dimension infinie, il existe un problème de Cauchy (associé à une fonction continue f : R × E E {\displaystyle f:\mathbb {R} \times E\rightarrow E} ) ne possédant pas de solution locale (par translations, les données initiales t 0 {\displaystyle t_{0}} , x 0 {\displaystyle x_{0}} peuvent être choisies arbitrairement dans un tel contre-exemple) ;
  • si E {\displaystyle E} possède un quotient séparable de dimension infinie, il existe même une fonction continue f : E E {\displaystyle f:E\rightarrow E} pour laquelle l'équation différentielle autonome associée x = f ( x ) {\displaystyle x'=f(x)} n'a aucune solution locale (quelle que soit la condition initiale)[6].

Cependant, le théorème de Cauchy-Peano-Arzelà se généralise en remplaçant R n {\displaystyle \mathbb {R} ^{n}} par un espace de Banach, à condition d'ajouter l'hypothèse (redondante en dimension finie) que l'application continue f {\displaystyle f} est compacte. Pour le démontrer[7], on utilise encore le théorème d'Ascoli, mais aussi le théorème du point fixe de Schauder.

Notes et références

  1. Jean-Pierre Demailly, Analyse numérique et équations différentielles [détail des éditions], p. 137
  2. (en) Gerald Teschl, Ordinary Differential Equations and Dynamical Systems, Providence, AMS, , 356 p. (ISBN 978-0-8218-8328-0, lire en ligne), p. 56
  3. Le critère d'Osgood (Teschl 2012, p. 58) fournit cependant une condition suffisante d'unicité, moins restrictive que celle de Cauchy-Lipschitz. Voir aussi Critère de Nagumo.
  4. G. Peano, « Démonstration de l'intégrabilité des équations différentielles ordinaires », Math. Ann., vol. 37,‎ , p. 182-228 (lire en ligne)
  5. (en) A. N. Godunov, « On Peano’s Theorem in Banach spaces », Funct. Anal. Appl., vol. 9,‎ , p. 53-55
  6. (en) Petr Hájek (en) et Michal Johanis, « On Peano's theorem in Banach spaces », J. Differential Equations, vol. 249, no 12,‎ , p. 3342-3351, arXiv:0911.4860
  7. (en) J. M. Ayerbe Toledano, T. Domínguez Benavides et G. López Acedo, Measures of Noncompactness in Metric Fixed Point Theory, Springer, , 211 p. (ISBN 978-3-7643-5794-8, lire en ligne), p. 15

Voir aussi

Articles connexes

  • Théorème d'existence de Carathéodory (en)
  • Solution maximale (de)
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