Mort subite du nourrisson

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Mort subite du nourrisson

Données clés
Classification et ressources externes
CISP-2 A95Voir et modifier les données sur Wikidata
CIM-10 R95
CIM-9 798.0
OMIM 272120
DiseasesDB 12633
MedlinePlus 001566
eMedicine 804412
ped/2171
MeSH D013398
Patient UK Sudden-infant-death-syndrome

Wikipédia ne donne pas de conseils médicaux Mise en garde médicale

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Le syndrome de mort subite du nourrisson (MSN) est la mort soudaine du jeune enfant, âgé d'un mois à un an et apparemment en bonne santé, lors de son sommeil. Le syndrome est aussi connu sous son acronyme anglais SIDS (Sudden Infant Death Syndrome). Le terme médical français exact en 2008 est mort subite inexpliquée du nourrisson (MSIN). En 2009, le terme de mort inattendue du nourrisson (MIN) est désormais utilisé afin de prendre en compte tous les cas de mort survenant brutalement chez un nourrisson alors que rien, dans ses antécédents connus, ne pouvait la laisser prévoir[1].

Épidémiologie

Son incidence est variable selon le pays. La Nouvelle-Zélande a, par exemple, une incidence près de dix fois supérieure à celle du Japon[2]. Elle tend à fortement diminuer, surtout à partir des années 1990, pour se stabiliser après les années 2000[3]. Le taux aux États-Unis en 2004 est proche de 1 cas pour 2 000 naissances[4].

Causes et facteurs de risque

L'autopsie permet d'identifier une cause précise dans un cas sur dix, le plus souvent respiratoire ou infectieuse[5]. Une anomalie génétique cardiaque (syndrome du QT long) est retrouvée également dans un cas sur dix[6].

Le meurtre est parfois la cause réelle de la mort subite du nourrisson[7]. Le professeur Michel Roussey du CHU de Rennes estime qu'environ 10 % des morts subites du nourrisson sont en fait des homicides masqués[8]. En Belgique, selon le Professeur Werner Jacobs de l’hôpital universitaire d’Anvers, 20% des cas de morts subites de nourrissons sont liés à des violences. Les violences sont rarement détectées car l'autopsie de l'enfant n'est pas obligatoire[9]. Par ailleurs, comme l'explique une revue de littérature publiée dans le New England Journal of Medicine, il est impossible à l'autopsie de distinguer un homicide par suffocation intentionnelle d'une véritable mort subite du nourrisson[10]. Selon le même article, l'homicide par suffocation intentionnelle représenterait 5% des cas de MSN[10]. Dans un article publié dans le British Medical Journal en 1999, M.A. Green, professeur émérite de science forensique à l'université de Sheffield, rapporte que les pathologistes pédiatriques et les pathologistes médicolégaux estiment que 20% à 40% des cas de mort subite du nourrisson sont en réalité des infanticides[11]. L'anthropologue américaine Sarah Blaffer Hrdy de l'université de Californie estime que 75% des morts subites du nourrisson sont des homicides[12]. Ce résultat corrobore le comportement qu'elle a observé chez les primates où Hrdy a identifié l'infanticide comme une stratégie de reproduction[13].

Dans les autres cas, des facteurs de risque ont été déterminés et la lutte contre ces derniers a permis la chute spectaculaire du nombre de morts de nourrissons dans les années 1990 (plus de 75 % en France)[réf. nécessaire] :

  • la position de couchage sur le ventre[14] et sur le côté [15] ;
  • un partage du lit avec une autre personne[16] appelé aussi co-dodo ;
  • une chambre trop chauffée[17] ;
  • le tabagisme de la mère pendant la grossesse et le tabagisme passif[18] ;
  • l'âge du nourrisson (pic de décès entre deux et six mois) ;
  • la prématurité[19] ;
  • le sexe masculin est deux fois plus victime de cette pathologie[2] ;
  • d'après plusieurs études, le non-allaitement est un facteur de risque important[20] ;
  • l'encombrement du lit empêchant la libre circulation de l'air : tour de lit, peluche, etc.

Un milieu social défavorable majore également le risque de mort subite, probablement du fait d'une plus grande fréquence de facteurs de risque reconnus[21].

Il existe une composante génétique, non encore identifiée, avec des formes familiales[22]. Une déficience en acyl-CoA déshydrogénase à chaine moyenne (MCADD), enzyme impliquée dans le catabolisme des lipides, a été identifiée dans de nombreux cas de morts subites chez le nourrisson. Le glucose étant le principal carburant de la cellule après l'apport alimentaire, le catabolisme des lipides est important entre les prises de nourritures puisqu'il assure l'apport énergétique de la cellule lorsque la glycémie baisse et constitue 80 % de l'apport en énergie des cellules cardiaques. La mort subite chez le nourrisson atteint d'une déficience en MCAD peut être causée par un déséquilibre entre l'oxydation des acides gras et du glucose. Un autre facteur de risque est une canalopathie, maladie due à un dysfonctionnement de canaux ioniques jouant un rôle crucial dans la contraction des cellules cardiaques.

Près de 10 % des morts subites n'ont cependant aucun facteur de risque reconnu[2].

Un déséquilibre de sérotonine pourrait expliquer 50 % des cas de mort subite du nourrisson[23].

Une autre hypothèse serait possiblement infectieuse avec la présence de certains germes trouvés de manière plus fréquente chez les morts subites inexpliquées par rapport aux morts subites à cause identifiée[24]. L'explication de cette corrélation n'est cependant pas claire.

Mécanisme

Il est, pour l'instant, inconnu. L'hypothèse en vogue serait un problème d'automaticité de la respiration ou des fonctions végétatives due à une maturation neurologique insuffisante[2]. L'absence, ou le caractère incomplet, de réveil malgré la présence de stimulus physiologiques pourrait être un facteur aggravant[25]. L'absence de respiration réflexe (« gasp ») en cas de défaut d'oxygénation du cerveau, pourrait être également l'un des mécanismes[26].

Mesures de prévention

Une affiche d'éducation parentale aux États-Unis promouvant le couchage sur le dos.

L'enfant doit être couché sur le dos. Des campagnes d'information ont été lancées dans plusieurs pays à la fin des années 1990 à ce sujet, notamment la campagne canadienne[27], ce changement d'attitude ayant pu réduire le risque de mort subite de moitié[14].

Le matelas doit être ferme. Les couvertures et les éléments de literie trop mous sont à éviter. Le couchage de l'enfant doit être séparé de celui des parents ou d'un autre enfant. Il faut éviter le surchauffage et le tabagisme autour des nourrissons.

Les bébés qui dorment dans une chambre où un ventilateur brasse de l'air réduit de 72 % le risque de faire une MSN comparativement à des enfants qui dorment sans ventilateur[28]. Il importe de réduire le confinement et le fait que le bébé inhale du dioxyde de carbone qu'il a exhalé[29]. D'autres études sont nécessaires pour mieux déterminer les relations entre les différents types de ventilation et les risques de MSN (pour écarter les biais potentiels de l'étude princeps).

La prise en charge psychologique des familles ayant eu un cas de mort subite du nourrisson est souvent nécessaire. La peur d'une récidive chez un autre enfant en bas âge est toujours présente mais le risque, même s'il est statistiquement majoré, reste extrêmement faible, inférieur à 1 %[2].

Plusieurs entreprises commercialisent des capteurs (fréquence cardiaque, mouvements respiratoires, oxymétrie…) reliés à un téléphone. Leur intérêt n'est cependant pas établi et ils n'ont pas l'agrément comme dispositif médical. Ils peuvent être anxiogènes en raison des alarmes non justifiées[30].

Notes et références

  1. Lorsque les examens radiologiques, toxicologiques ou l'autopsie permettent de déterminer une cause précise au décès, la Haute Autorité de santé recommande d'utiliser le terme de mort inattendue du nourrisson ; lorsqu'ils ne permettent pas de déterminer l'origine polyfactorielle de la mort, la HAS recommande d'employer le terme de syndrome de mort subite du nourrisson.
  2. a b c d et e (en) Kinney HC, Thach BT, The sudden infant death syndrome, N Eng J Med, 2009;361:795-805
  3. (en) Hauck FR, Tanabe KO, International trends in sudden infant death syndrome: stabilization of rates requires further action, Pediatrics, 2008;122:660-666
  4. (en) Hoyert DL, Mathews TJ, Menacker F, Strobino DM, Guyer B, « Annual summary of vital statistics: 2004 » Pediatrics, 2006;117:168-183
  5. (en) Vennemann M, Bajanowski T, Butterfass-Bahloul T et al. « Do risk factors differ between explained sudden unexpected death in infancy and sudden infant death syndrome? » Arch Dis Child. 2007;92:133-136
  6. (en) Arnestad M, Crotti L, Rognum TO et al. Prevalence of long-QT syndrome gene variants in sudden infant death syndrome, Circulation, 2007;115:361-367
  7. (en-US) Alan W. Cashell, « Homicide as a Cause of the Sudden Infant Death Syndrome », The American Journal of Forensic Medicine and Pathology, vol. 8, no 3,‎ , p. 256 (ISSN 0195-7910, DOI 10.1097/00000433-198708030-00012, lire en ligne, consulté le )
  8. Cécile Daumas, « La mort cachée des bébés », sur Libération, (consulté le ) : « «Déjà éprouvés par la mort de leur bébé, les parents sont épouvantablement choqués qu'on puisse les soupçonner», explique le Pr Michel Roussey du CHU de Rennes. Lors d'un colloque en novembre à l'université Rennes-II, ce pédiatre très engagé dans la lutte contre les maltraitances évoquait les cas problématiques de morts subites du nourrisson. Grâce aux nouvelles recommandations de couchage (sur le dos et non plus sur le ventre), ces décès que la médecine peine toujours à expliquer ont diminué de 75 % depuis quinze ans. «Bien évidemment, nous croyons la grande majorité des parents car 90 % des morts subites de nourrisson sont bien réelles, dit le Pr Roussey. Malheureusement, quand l'enfant a été mis en danger, nous ne devons pas les croire. Environ 10 % des morts subites du nourrisson sont en fait des homicides masqués.» »
  9. Aline Delvoye, « 'La mort subite du nourrisson n'existe presque jamais' », sur RTBF, (consulté le )
  10. a et b (en) Hannah C. Kinney et Bradley T. Thach, « The Sudden Infant Death Syndrome », New England Journal of Medicine, vol. 361, no 8,‎ , p. 795–805 (ISSN 0028-4793 et 1533-4406, PMID 19692691, PMCID PMC3268262, DOI 10.1056/NEJMra0803836, lire en ligne, consulté le ) :

    « It is estimated that among cases of sudden infant death, the incidence of infanticide due to intentional suffocation is less than 5%. Although intentional suffocation with a soft object (e.g., a pillow) is virtually impossible to distinguish from SIDS at autopsy. »

  11. (en) M. A. Green, « Time to put “cot death” to bed? », BMJ, vol. 319, no 7211,‎ , p. 697–700 (ISSN 0959-8138 et 1468-5833, PMID 10480831, DOI 10.1136/bmj.319.7211.697, lire en ligne, consulté le ) :

    « Child homicide, especially by the mother, is by its very nature difficult to detect. [...] Paediatric pathologists and forensic pathologists say that parental or adult intervention may have occurred in 20-40% of the cases of so called sudden infant death syndrome with which they are involved. »

  12. « The Infamous Brad - Not That the Actual Forbidden Knowledge is as Interesting as That There Is Forbidden Knowledge », sur web.archive.org, (consulté le ) : « One of the researchers, she says, was an epidemiologist who, in the process of trying to quantify his hunch, initiated a study in which social workers and police very, very intensively interviewed and background checked a long string of crib deaths that had been explained away as unexplained random respiratory failure. It turns out that his equation was able to predict, with high (but not absolute) reliability, which infants had actually been the victims of homicide or malign neglect. If the infant was a boy when the mother wanted a girl or vice versa, if the infant was born weighing less than 8 pounds, or if the mother was in any kind of economic or physical danger if this child survived, then the baby was doomed. His final estimate, from that initial study, was that seventy five percent of all SIDS cases are actually homicides. »
  13. Sarah Blaffer Hrdy, « Infanticide as a Primate Reproductive Strategy: Conflict is basic to all creatures that reproduce sexually, because the genotypes, and hence self-interests, of consorts are necessarily nonidentical. Infanticide among langurs illustrates an extreme form of this conflict », American Scientist, vol. 65, no 1,‎ , p. 40–49 (ISSN 0003-0996, lire en ligne, consulté le )
  14. a et b (en) Willinger M, Hoffman HJ, Hartford RB, Infant sleep position and risk for sudden infant death syndrome: report of meeting held January 13 and 14, 1994, National Institutes of Health, Bethesda, MD, Pediatrics, 1994;93:814-819
  15. Side sleeping position and bed sharing in the sudden infant death syndrome.
  16. (en) Hauck FR, Herman SM, Donovan M et al. « Sleep environment and the risk of sudden infant death syndrome in an urban population: the Chicago Infant Mortality Study » Pediatrics, 2003;111:1207-1214
  17. (en) Ponsonby AL, Dwyer T, Gibbons LE, Cochrane JA, Wang YG, « Factors potentiating the risk of sudden infant death syndrome associated with the prone position » N Engl J Med, 1993;329:377-382
  18. (en) Blair PS, Fleming PJ, Bensley D et al. « Smoking and the sudden infant death syndrome: results from 1993-5 case-control study for confidential inquiry into stillbirths and deaths in infancy » BMJ, 1996;313:195-198
  19. (en) Horne RS, « Effects of prematurity on heart rate control: implications for sudden infant death syndrome » Expert Rev Cardiovasc Ther, 2006;4:335-343
  20. (en) Chen A, Rogan WJ, « Breastfeeding and the risk of postneonatal death in the United States » Pediatrics, 2004;113:e435-e439}. "Voir aussi La lèche league".
  21. (en) Ford RP, Nelson KP, « Higher rates of SIDS persist in low income groups » J Paediatr Child Health, 1995;31:408-411
  22. (en) Oyen N, Skjaerven R, Irgens LM, « Population-based recurrence risk of sudden infant death syndrome compared with other infant and fetal deaths » Am J Epidemiol, 1996;144:300-305
  23. (en) Paterson DS, Trachtenberg FL, Thompson EG et al. « Multiple serotonergic brainstem abnormalities in sudden infant death syndrome » JAMA', 2006;296:2124-2132
  24. (en) Weber MA, Klein NJ, Hartley JC, Lock PE, Malone M, Sebire NJ, « Infection and sudden unexpected death in infancy: a systematic retrospective case review » Lancet, 2008;371:1848-1853
  25. (en) Kato I, Franco P, Groswasser J et al. « Incomplete arousal processes in infants who were victims of sudden death » Am J Respir Crit Care Med, 2003;168:1298-1303
  26. (en) Sridhar R, Thach BT, Kelly DH, Henslee JA. « Characterization of successful and failed autoresuscitation in human infants, including those dying of SIDS » Pediatr Pulmonol. 2003;36:113-122 PMID 12833490
  27. « Dodo sur le dos » [PDF] sur www.phac-aspc.gc.ca.
  28. (en) Coleman-Phox K, Odouli R, Li DK, « Use of a fan during sleep and the risk of sudden infant death syndrome » Arch Pediatr Adolesc Med, 2008;162:963-8
  29. « Contre la mort inexpliquée du nourrisson - Faut-il mettre un ventilateur dans la chambre des bébés ? », Le quotidien du médecin, no 9434, 7 octobre 2008, p. 8
  30. Bonafide C, Jamison DT, Foglia EE, The emerging market of smartphone-integrated infant physiologic monitors, JAMA, 2017;317:353-354

Voir aussi

Bibliographie

  • Syndrome de la mort subite du nourrisson (MSN) Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital de Rennes.
  • Numéro thématique « Morts inattendues du nourrisson ». Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire  ; N°3-4 (http://www.invs.sante.fr/beh/2008/03_04/).
  • Haute Autorité de Santé. « Prise en charge en cas de mort inattendue du nourrisson (moins de 2 ans) ». Recommandations professionnelles. Saint-Denis : HAS, 2007. (www.has-sante.fr).
  • Perbos P, Topuz B. Le guide du bébé : les bons gestes de 0 à 1 an. Librio, collection Santé, Paris 2006.

Liens externes

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    • Héritage mendélien chez l'humain
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