Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou 1993

FESPACO 1993
Image liée à la cérémonie
13e Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou
Détails
Dates Du 20 au
Lieu Ouagadougou, Burkina Faso
Site web fespaco.bf
Résumé
Au nom du Christ Gnoan Roger M'Bala
Chronologie
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Le FESPACO 1993 est la 13e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou. Il se déroule du 20 au 27 février 1993 à Ouagadougou au Burkina Faso.

Le thème de cette édition est Cinéma et libertés. Le colloque porte sur Cinéma et droits de l’enfant[1].

Le film Au nom du Christ de Gnoan Roger M'Bala décroche l'Étalon de Yennenga.

Contexte

Le Programme d'ajustement structurel (PAS) entraîne la réduction des dépenses publiques et des fermetures d'entreprises et donc du chômage au Burkina Faso. Le contexte socio-politique est très tendu. Policiers et gendarmes en armes occupent le campus universitaire de Ouagadougou le 21 janvier, à un mois du festival, pour empêcher la reprise de manifestations contre la baisse du montant des bourses qui, selon des sources hospitalières, avaient fait quinze blessés la veille[2]. L'armée tire sur la foule, mais cela n'empêche pas la bonne tenue du Fespaco[3].

Aux Journées cinématographiques de Carthage 1992, un colloque international La création cinématographique du Sud face aux marchés du Nord : perspectives pour les cinémas africains et arabes réunit les professionnels sous la direction d'Abdellatif Ben Ammar. Dans son texte de base, Ferid Boughedir fait le constat de la nécessité des subventions et des coproductions pour produire les films africains et arabes, sans que les coproductions Sud-Sud ne décollent vraiment[4]. Le succès des films étant davantage au Nord, certains se modèlent sur les attentes de ce public : exotisme dépaysant, barbarie de coutumes rétrogrades, détresse née de l'appauvrissement. Cependant, les Fonds de soutien se sont multipliés comme la toute nouvelle Fondation française Écrans du Sud, et les films africains et arabes permettent une diversification des programmes face à l'hégémonie audiovisuelle américaine. C'est ainsi que l'enjeu est devenu de passer « de l'assistance au partenariat », axe du colloque[5].

Pour introduire le thème du festival, Cinéma et libertés en Afrique, le même Ferid Boughedir pose son importance en rappelant « l'effondrement des grands systèmes idéologiques du XXe siècle » et note que de jeunes cinématographies confidentielles sont peu censurées. Les cinéastes se font « la voix des sans-voix », abordant les droits des femmes, ainsi que la condition des paysans et des nouveaux prolétaires face à des régimes autoritaires. En situant leurs films à l'époque coloniale, « ils suggèrent, à l'abri de la censure, que bien des manquements se perpétuent après les indépendances ». La lutte pour la liberté est ainsi ruse et stratégie[6].

Déroulement

Les autorités encouragent la population ouagalaise à suivre le festival pour en retrouver le caractère populaire. La journée continue dans les administrations et les écoles permet de travailler en continu du matin jusqu'au début d'après-midi pour laisser la fin d'après-midi et la soirée libre pour aller au cinéma. Même, les fonctionnaires sont payés 48 heures plus tôt que prévu pour avoir les fonds nécessaires pour les films, la rue marchande et les fêtes[7].

L'inauguration a lieu au stade du 4 août, avec les tambours du Burundi et la troupe de Doudou N'diaye Rose, et se termine sur des feux d'artifice. Le film inaugural est Guelwar d'Ousmane Sembène[8].

Les films d'Afrique du Sud sont désormais bienvenus au Fespaco, mais ne se retrouvent que dans la sélection hors compétition. Selon le Secrétaire général permanent Filippe Savadogo, ils « insufflent une nouvelle dynamique au festival », tandis qu'une compétition TV/vidéo est créée à la suite d'« une longue réflexion »[9].

Un hommage est ménagé à l'acteur sénégalais Douta Seck et un atelier est organisé sur la situation des comédiens[10].

La FEPACI tient les 21-24 février son Ve congrès et, forte de « sa crédibilité retrouvée », souligne « l'absence totale de politiques nationales dans la majorité des pays ». Un état du cinéma africain est en cours pour déterminer les stratégies futures[11].

Le Comité national d'organisation (CNO) est présidé par Simon Ouédraogo, secrétaire général du ministère de la Culture. François Vokouma, de la SONACIB (Société nationale cinématographique burkinabè), préside la commission programme, tandis que Boureima Sawadogo préside celle des finances. Un mini-Fespaco est organisé à Bobo-Dioulasso[12].

Le jury officiel est composé de l'écrivain ivoirien Ahmadou Kourouma, l'historien Ibrahima Baba Kake, les cinéastes Taïeb Louhichi, Mariama Hima, Arnold Antonin, Ramalan Nuhu du Niger, Lionel Ngakane (en) d'Afrique du Sud et Eulalia Catherine Namai du Kenya, le critique italien Marco Müller, le journaliste burkinabè Jean-Pierre Ilboudo ainsi que l'avocat burkinabè Issouf Baadhio[13].

Le jury de la compétition télévisuelle est composé de Serge-Théophile Balima, le réalisateur Sibiri Raphaël Dakissaga, l'universitaire et cinéaste Claire Andrade Watkins (en), la modèle Karen Alexander (en) et l'écrivaine Laura Gläser-Weisser[14].

Hamidou Ouedraogo dénombre 156 films de 71 pays, 421 journalistes, 187 cinéastes et 2426 festivaliers badgés[15]

Palmarès

Prix Lauréat Film Pays
Grand prix Étalon de Yennenga Roger Gnoan M'Bala Au nom du Christ Drapeau de la Côte d'Ivoire Côte d'Ivoire
Prix Oumarou Ganda Léonce Ngabo Gito, l'ingrat Drapeau du Burundi Burundi
Prix d'interprétation féminine Maysa Marta Les Yeux bleus de Yonta de Flora Gomes Drapeau de la Guinée-Bissau Guinée-Bissau
Prix d'interprétation masculine Josef Kumbela (en) Gito, l'ingrat de Léonce Ngabo Drapeau du Burundi Burundi
Prix du meilleur scénario Bachir El Dick Contre le gouvernement d'Atef El Tayeb Drapeau de l'Égypte Égypte
Prix spécial du jury (longs métrages) Mamadou Djim Kola Toungan, les Etrangers Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix du meilleur court métrage Mohamed Camara Denko Drapeau de la Guinée Guinée
Prix de la meilleure musique Abdullah Ibrahim Yelema de Mamo Cissé Drapeau du Mali Mali
Prix de la meilleure image Augustin Cubano Sankofa de Hailé Gerima Drapeau de l'Éthiopie Éthiopie
Prix du meilleur film documentaire Kamal Dehane Femmes d'Alger Drapeau de l'Algérie Algérie
Prix spécial du jury (longs métrages) Mamadou Djim Kola Les Etrangers Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix spécial du jury (courts métrages) Amet Diallo Boxumaleen !! L'an... Fer Drapeau du Sénégal Sénégal
Prix Paul Robeson de la diaspora Raoul Peck Lumumba, la mort d’un prophète Drapeau d'Haïti Haïti
Prix du meilleur montage Kahena Attia Bezness de Nouri Bouzid Drapeau de la Tunisie Tunisie
Prix du meilleur son Newton Aduaka Quartier Mozart de Jean-Pierre Bekolo Drapeau du Cameroun Cameroun

Prix spéciaux

Prix Lauréat Film Pays
Prix Colombe de la paix Mansour Sora Wade Picc Mi Drapeau du Sénégal Sénégal
Prix PROMACO Kitia Touré Ça n'arrive pas qu'aux autres Drapeau de la Côte d'Ivoire Côte d'Ivoire
Prix AVS Hassan Benjelloun Setta, ville de l'an 2000 Drapeau du Maroc Maroc
Prix INALCO Djibril Diop Mambety Hyènes Drapeau du Sénégal Sénégal
Prix UNICEF enfants Pierre Yaméogo Wendemi (l'enfant du bon Dieu) Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix UNICEF femmes Anne Mungai Saïkati Drapeau du Kenya Kenya
Prix Mobil Honoré Compaoré Jigi (l'Espoir) de Kollo Daniel Sanou Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix APAC Anne Mungai Saïkati Drapeau du Kenya Kenya
Prix COE Gaston Kaboré Rabi Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix CDEAO Mamadou Djim Kola Toungan, les Etrangers Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix UICN Saddik Balewa Kasamu Ce Drapeau du Nigeria Nigeria
Prix de la ville de Ouagadougou Pierre Yaméogo Wendemi (l'enfant du bon Dieu) Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix OUA Mamadou Djim Kola Toungan, les Etrangers Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix Canal+ et Canal+ Horizons David-Pierre Fila Tala Tala Drapeau de la république du Congo République du Congo
Prix de la ville de Pérouse Flora M'mbugu-Schelling (en) These Hands Drapeau de la république du Congo République du Congo
Prix IPN Euzhan Palcy Siméon (film) Drapeau de la Martinique Martinique
Prix Ligue française de l'enseignement et Abola Gaston Kaboré Rabi Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix Air Afrique David-Pierre Fila Tala Tala Drapeau de la république du Congo République du Congo
Prix ACCT long métrage 1 Nouri Bouzid Bezness Drapeau de la Tunisie Tunisie
Prix ACCT long métrage 2 Pierre Yaméogo Wendemi (l'enfant du bon Dieu) Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix ACCT court métrage Mohamed Camara Denko Drapeau de la Guinée Guinée
Prix CRDI long métrage Léonce Ngabo Gito, l'ingrat Drapeau du Burundi Burundi
Prix CRDI court métrage Kollo Daniel Sanou Jigi (l'Espoir) Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix TV Gaston Kaboré, Pascal Didier Ouedraogo La Vie en fumée Drapeau du Burkina Faso Burkina Faso
Prix TELCIPRO long métrage Clarence Delgado Niiwam Drapeau du Sénégal Sénégal
Prix TELCIPRO court métrage Kitia Touré Ça n'arrive pas qu'aux autres Drapeau de la Côte d'Ivoire Côte d'Ivoire
Prix OCIC Mamo Cissé Yelema Drapeau du Mali Mali
Prix Afrique en créations long métrage Roger Gnoan M'Bala Au nom du Christ Drapeau de la Côte d'Ivoire Côte d'Ivoire
Prix Afrique en créations court métrage Mansour Sora Wade Picc Mi Drapeau du Sénégal Sénégal

Bilan

Le Secrétaire général, Filippe Sawadogo, se félicite que le Fespaco soit désormais « le second événement médiatique du continent, après la Coupe d'Afrique de football ». Les journalistes soulignent cependant les défauts de la programmation « où figurent, par idéal panafricain ou calcul diplomatique, des titres manifestement immatures »[16].

Si le MICA, le marché de l'audiovisuel, est en plein essor, son responsable, Abel Nadié, « regrette la faible présence des chaînes africaines »[16].

Pour Acéta Konaté, la dépendance budgétaire du Fespaco vis-à-vis des organisations et coopérations internationales est à l'image de la dépendance des cinématographies africaines[8].

Notes et références

  1. « FESPACO : Les 50 ans sous différents thèmes et visuels » (consulté le )
  2. AFP, « BURKINA : le campus de Ouagadougou occupé par les forces de l'ordre » Accès payant, sur Le Monde, (consulté le )
  3. Dupré 2012, p. 267.
  4. Ont notamment été coproduits sans apport du Nord, Le Moineau, Le Retour de l'enfant prodigue et Alexandrie pourquoi ? (Egypte-Algérie), Amok et Naitou l'orpheline (Maroc-Guinée), Le Porteur d'eau est mort de Salah Abou Seif (Egypte-Tunis) et Camp de Thiaroye (Sénégal, Algérie, Tunisie).
  5. Ferid Boughedir, « Colloque international », FEPACI info, no 9,‎ , p. 3-5
  6. Catalogue du 13ème Fespaco, p.35-36
  7. Dupré 2012, p. 263.
  8. a et b Acéta Konaté, « Fespaco 93 - Festival panafricain de cinéma », Journal des anthropologues, no 52,‎ , p. 121-124 (lire en ligne)
  9. Catalogue du 13ème Fespaco, p.5
  10. Catalogue du 13ème Fespaco, p.56-58
  11. Catalogue du 13ème Fespaco, Construire une cinématographie viable, p.95
  12. Catalogue du 13ème Fespaco, p.78
  13. Catalogue du 13ème Fespaco, p.62-63
  14. Catalogue du 13ème Fespaco, p.7
  15. Ouédraogo 1995, p. 207.
  16. a et b « La fête du cinéma africain Au Burkina-Faso, l'édition 1993 du Fespaco a cristallisé les réussites, les dérives et les interrogations des réalisateurs du continent » Accès payant, sur Le Monde, (consulté le )

Bibliographie

  • Colin Dupré, Le Fespaco, une affaire d'État(s), 1969-2009, L'Harmattan, , 406 p. (ISBN 978-2-336-00163-0)
  • Fespaco, Black Camera et Institut Imagine, Cinéma africain - Manifeste et pratique pour une décolonisation culturelle : Première partie - le FESPACO : création, évolution, défis, Ouagadougou, Auto-édition, , 786 p. (ISBN 978-2-9578579-4-4).
  • Hamidou Ouédraogo, Naissance et évolution du FESPACO de 1969 à 1973, Ouagadougou, Chez l'auteur, , 224 p.
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